Après un autre long voyage en bus et quelques changements, nous arrivons à Punta Arenas, port de départ pour la péninsule de Nicoya. En arrivant nous croisons une allemande qui revient tout juste du festival Envision, nous nous asseyons ensemble dans un café en attendant le bateau. Elle retourne à Santa Teresa où elle est depuis 3 semaines déjà. "Olie" de son surnom est médecin et sa vie en Allemagne semble un mélange de trop de travail et de quotidien qui l’ennuie. On dirait qu’elle aussi travaille dans un domaine qui est parfois très macho encore. Son voyage est de quelques mois et elle se pose longtemps dans certains endroits, elle se cherche plus qu’elle ne cherche à visiter et faire la touriste. J’aime bien ses idées. Je dois dire que ça me fatigue un peu aussi de bouger sans arrêt d’un endroit à l’autre. Sur le chemin pour monter dans le bateau, nous croisons Jack, il est anglais et c’est son premier voyage en backpacker seul. Il a des histoires incroyables à raconter et une candeur de néophyte du voyage qui est particulièrement rafraichissante et enthousiasmante. Tous les quatre embarquons sur le navire et c’est au son de la musique à la mode, salsa et reggaeton, que nous voguons vers la péninsule tout en papotant. Nous rigolons bien, on décide de poursuivre le voyage jusqu’à Santa Teresa, convaincus par Olie, notre nouvelle guide. 


Arrivés là-bas nous logeons au même hostel qu’Olie et comme nous sommes introduits, le proprio nous fait un prix si nous restons 3 nuits. Une petite pause après un bon trek et pas mal de bus, on dit oui. Le lendemain nous nous retrouvons tous les 4, Jack est dans une autre auberge, pour une session de Silk Yoga. Santa Teresa c’est une grande rue en bord de plage, des auberges à la cool, quelques hôtels, des restaurants et des bars mais ce n’est pas blindé et la plage est jolie, avec des vagues valables pour plusieurs niveaux de surf. La vie semble touristique mais pas hyperactive non plus. On y mange très bien pour peu qu’on y mette le prix, on peut aussi faire la cuisine à notre hostel alors c’est parfait de pouvoir alterner entre les deux. Les auberges, hôtels, restaurants et boutiques semblent tous propriétés d’israéliens ou d’argentins. Il y a beaucoup d’argentins également qui y travaillent. Apparemment ce coin était plus ou moins désert il y a une dizaine d’années et des fans de surf sont venus s’y implanter et démarrer à partir de rien les villages qui ont proliféré à grande vitesse le long de la côte de la péninsule. L'inaccessibilité de certaines routes et le manque de bus permettent à beaucoup de trouvé des coins cachés, tranquilles et relaxants. Nous ne voyons pas beaucoup de locaux même s’il y en a et nous demandons où ils vivent. Plus dans les terres a priori. 


Nous commençons la séance de Silk Yoga par un échauffement incluant un peu d’acro-yoga, un yoga qui se fait à deux et qui tout en étant impressionnant est hyper agréable à réaliser en couple. On enchaîne dehors sur deux longues bandes de tissus accrochées à une branche au-dessus d’un épais matelas. On paraît tous sans exception très gracieux, suspendus en l’air à faire des enchaînements qui nouent et dénouent les bandes de tissu en un joyeux ballet coloré. C’est un bon moment de joie, de rire et de découverte alors que nous contorsionnons gentiment notre corps sous l’œil attentif de notre professeure argentine.

 

Le lendemain, Tom se fait un petit plaisir et nous louons un quad. A nous la poussière des routes dans la figure ! C’est une façon sympa même si un peu bruyante de visiter le coin car la voiture n’est pas praticable sur les chemins de la péninsule en beaucoup d’endroits. Nous partons le long de la côté, direction une cascade et en passant par un petit cimetière situé sur une petite île accessible à pied à marée basse. Il fait chaud. Pour visiter la cascade par le haut, il faut payer et emprunter une série de ponts en planches et câbles d’acier au-dessus de la jungle. C’est plutôt joli. Il y a des groupes de touristes en balade. On se baigne au pied de la plus basse des cascades. Elle est superbe. L’eau est bonne et l’endroit assez paisible malgré le monde. Devant nous, trois jeunes filles passent leur temps à se prendre en selfie. Un pose comme ci ou comme ça, différents angles afin de paraître plus comme ci ou comme ça. Elles se prennent même en selfie à sauter depuis un rocher dans le bassin de la cascade. Où est passé le plaisir simple de sauter dans l’eau pour sauter dedans ? On dirait que leur téléphone est greffé à leurs mains et continuellement connecté au reste du monde rivé sur son écran. Je soupire un peu mais bon nous voilà repartis en quad à fond les ballons sur les chemins pour rentrer.


Nous y retrouvons Olie partie chercher des sous à la banque du coin et que nous ramenons. C’est parti pour un apéro sur la plage, un dîner au bar de la plage et un grand jeu de Perudo. Un jeu que Jack a ramené avec lui et qui se joue avec des dés.

Ca devient rapidement une compétition internationale où nous prenons chacun les noms de nos pays d’origine. Un américain de l’aurberge où nous sommes s’est également joint à nous pour la soirée alors c’est une rencontre au sommet entre l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et le Japon. La finale sera féminine et nippo-allemande. Quand nous repartons, c’est bien reposés et joyeux. Santa Teresa reste un endroit très touristique mais son côté calme, pour touristes plutôt surfeurs et moins consommateurs, conserve au lieu une certaine authenticité qui est agréable par rapport au reste de la côte costaricaine. 

Nous reprenons le bateau dans l’autre sens puis un autre bus et nous passons par Libreria, une ville étape sur notre chemin pour atteindre Playa del Coco où nous allons voir une amie de Tom qui y habite. L’auberge à Libreria est grillagée, l’endroit n’est pas touristique, c’est à côté du terminal des bus pour partir ailleurs. On ne trouve d’ailleurs qu’un petit soda, restau/fast food local qui sert des plats locaux (riz, haricots rouges avec des trucs et une sauce bien piquante principalement) pour dîner. Dans la nuit, nous sommes réveillés par des coups de feu. Là, je réalise à quel point les derniers évènements de ces dernières années ont profondément modifié notre façon de pensée. Immédiatement, l’un comme l’autre pensons à un terroriste fou qui tire sur tout ce qui bouge. Les coups de feu se répètent en plus on entend des voitures qui roulent à vive allure. Tom veut sortir, dit qu’on va se retrouver coincés ici si un fou débarque. On attend quand même. Finalement, ça s’arrête. On ne dort pas très bien cette nuit-là mais on arrive au bout. On prend le premier bus hors de ce coin. On apprendra plus tard auprès de l’amie de Tom qu’à Libreria il y a un festival rural et que lors de celui-ci, lorsque les gens sont bien éméchés, ils tirent parfois des coups en l’air. Elle nous dira aussi que depuis quelques années toutefois, l’insécurité a beaucoup augmenté dans les grandes villes du Costa Rica et que Libreria n’est plus très sûre. La faute à l’augmentation flagrante et vertigineuse des inégalités, conséquence désastreuse d’un développement touristique réalisé à tort et à travers sans que cela ne profite vraiment au gros de la population locale. Ce problème est bien répété à l’infini dans tous les domaines et dans le monde entier. Les développements rapides et incontrôlés, dérégulés pour ainsi dire, créent des inégalités qui ne sont, elles, pas prêt de disparaître. C’est bête, on n’apprend rien en tant qu’humanité à répéter ce motif à l’infini alors qu’il serait si simple de bien commencer pour éviter ces conséquences.

Bref, nous arrivons à Playa del Coco, beaucoup plus propre et organisée, et évidemment plus riche. On retrouve une ville à la Manuel Antonio, avec un peu plus de retenue toutefois, donnant à la ville l’aspect d’une station balnéaire classique d’un pays riche à cette exception près que la proportion de locaux reste faible, bien qu’ils soit plus présents là qu’à Santa Teresa. Nos sacs de voyage sur le dos, le soleil au-dessus de nos têtes, nous traversons la petite ville à la recherche d’un endroit où dormir ce soir. C’est cher. Nous finissons par revenir dans un endroit qui semble raisonnable, même si un peu au-dessus de notre budget. Tant pis, il ne semble pas y avoir d’autres choix accessibles et il y a une piscine en plus. Jolie chambre et hôtes sympas. On aurait pu tomber sur pire. Le soir nous retrouvons Clara donc, l’amie de Tom qui habite ici. Elle vient avec une amie à elle qui est installée au Costa Rica depuis plusieurs années. On passe une soirée agréable à siroter des cocktails dans un bar à touristes et à papoter. A l’auberge, nous rencontrons une femme noire-américaine qui nous propose de la mangue et nous raconte qu’elle prie tous les jours et est très croyante et trouve tout génial.

Dans la rue, nous croisons un français d’à peu près 40 ans qui vient de se faire larguer par sa copine quelques semaines plus tôt alors il n’est pas reparti et vend du café moulu sur place dans une petite carriole. La vie dans cette station semble plus équilibrée, les gens qui y travaillent sont locaux au moins même si la propriété semble rester l’apanage, à quelques exceptions près, des étrangers qui ont investi dans le coin. Notre quatrième semaine s’achève. Demain départ pour le Nicaragua. On n’est pas loin de la frontière alors nous allons en profiter pour aller y faire un tour.